Contrat de travail

On sait que lorsque le médecin du travail déclare un salarié inapte à son poste, l’employeur doit recueillir l’avis des Délégués du personnel, et désormais du Comité social et économique, sur les propositions de reclassement qu’il sera amené à adresser au salarié (C. trav., art. L. 1226-2 et -10). Depuis le 1er janvier 2017 (loi du 8 août 2016), cette obligation s’applique à toutes les inaptitudes, y compris d’origine non professionnelle.

Le manquement à cette obligation est lourdement puni, du moins s’agissant des inaptitudes d’origine professionnelle (C. trav., art. L. 1226-14) : l’absence ou l’irrégularité de la consultation est sanctionnée comme un manquement pur et simple de l’employeur à son obligation de reclassement.

Dans l’esprit de la loi, l’avis des représentants du personnel vise donc à enrichir la réflexion sur les solutions propres à permettre le reclassement du salarié.

Depuis le 1er janvier 2017, la loi autorise le médecin du travail à inscrire dans son avis d’inaptitude la mention suivante : « tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé », ou – variante – « l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi » (C. trav., art. L. 1226-2-1 et -12, et R. 4624-42).

Dans un tel cas, faute de tout reclassement possible, la consultation des représentants du personnel ne présente aucun intérêt. S’impose-t-elle néanmoins ?

Certains adopteront (adoptent déjà) une telle position, considérant que, même dans ce cas, la loi ne dispense pas l’employeur de consulter les représentants du personnel.

Pourtant, la loi prévoit expressément que l’avis porte sur la « proposition » de reclassement : si aucune proposition ne peut être faite, l’avis devient sans objet, et l’employeur ne saurait être tenu d’organiser la consultation.

Récemment, la Cour d’appel de Riom (3 avril 2018, 16/011261) a retenu cette solution de bon sens.

De même, dans un cas un peu différent, la Cour de cassation (Soc. 5 octobre 2016, n° 15-16782) a admis que si les dispositions du Code du travail exigent que l’avis des Délégués du personnel intervienne avant la proposition de reclassement, « une telle exigence ne résulte, en l’absence de proposition de reclassement », pas de ces dispositions.

Que faut-il de plus pour reconnaître que cette consultation ne s’impose pas lorsque tout reclassement est exclu par les termes de l’avis du médecin du travail (conformes à l’une des deux mentions ci-dessus) ?

Mais la raison ne suffit pas toujours à l’emporter… Sans doute la sécurité juridique invite-t-elle à maintenir cette consultation « inutile », au moins dans les cas plus sensibles (salariés protégés ; inaptitude d’origine professionnelle ; ancienneté importante…) – et ce, tant que la question n’est pas définitivement tranchée (par la Cour de cassation ou le législateur).